La loi impose aujourd’hui des normes en matière de logement que les locataires et les propriétaires doivent respecter pour jouir d’un bien immobilier. Respect de critères de décence et d’habitat digne, obligation de préservation d’immeuble collectif, de Diagnostic de Performance Énergétique, de travaux embarqués… Quand ces obligations traduisent-elles une obligation d’isolation thermique ? Quand la rénovation énergétique d’un logement est-elle obligatoire ? Tour d’horizon des dispositions règlementaires en vigueur.
Obligation rénovation copropriété : l’obligation d’entretien et de conservation de l’immeuble
La loi du 10 juillet 1965 fixe le statut des copropriétés d’immeubles bâtis. Elle pose notamment le principe selon lequel le copropriétaire « use et jouit librement de son lot ».
bon à savoir
Qu’est-ce qu’un lot en copropriété ?
En copropriété, la propriété collective du bâtiment est répartie par lots entre les différents copropriétaires. Chaque lot comporte une partie privative (le logement) et une quote-part des parties communes (couloirs, escaliers, toit, murs, toiture…). Elles sont indissociables l’une de l’autre.
Par ailleurs, l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que le syndicat de copropriétaires « a pour objet la conservation et l’amélioration de l’immeuble ainsi que l’administration des parties communes ».
La loi le désigne également « responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes ».
Le syndicat a ainsi l’obligation de procéder aux travaux nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble. Cette obligation doit être conciliée avec le principe de libre jouissance par les copropriétaires de leur lot.
Le syndicat ne peut donc contraindre le copropriétaire à réaliser des travaux que s’il s’agit de travaux sur parties communes (isolation thermique des murs par l’extérieur…) ou de travaux d’intérêt collectif sur parties privatives (isolation thermique de parois vitrées donnant sur l’extérieur…). Il n’a pas de droit de regard sur les travaux « d’intérêt privé » sur les parties privatives des copropriétaires.
Bon à savoir
Le syndic est chargé d’administrer l’immeuble et lui aussi, de garantir sa bonne conservation. En cas d’urgence, le syndic doit d’ailleurs réagir et prendre la décision de faire des travaux s’il le faut sans AG du syndicat des copropriétaires. Les travaux seront alors ratifiés a posteriori par le syndicat.
Faire des travaux de rénovation énergétique pour conserver l’immeuble
« Sur le long terme, une absence d’isolation ou une mauvaise isolation des murs, des planchers, de la toiture, des combles, combinée à un chauffage défaillant et une mauvaise ventilation, peut créer des problèmes sur la structure de l’immeuble et fragiliser son enveloppe. Un manque de chauffage va avoir pour effet de faire monter l’humidité d’un logement ce qui va entraîner une dégradation prématurée de la structure » explique Karima Bensaou, ingénieure en efficacité énergétique chez Penser Mieux l’Énergie.
L’obligation de sauvegarde de l’immeuble par les copropriétaires recouvre donc bien une obligation de rénovation énergétique. Les copropriétaires doivent faire preuve d’une vigilance continue sur le niveau d’isolation, l’état des équipements de chauffage et de la ventilation dans leurs logements et le bâtiment, même si la sauvegarde de l’immeuble n’est menacée qu’à long terme par l’inaction en matière de rénovation énergétique.
L’obligation de rénover le logement pour respecter les critères de décence
Pour pouvoir être loué à titre de résidence principale à un locataire, un logement, qu’il soit vide ou meublé, doit remplir certains critères de décence. Le logement décent est défini par le décret « décence » du 30 janvier 2002.
Le décret fixe notamment les critères de décence suivants :
- la ventilation est en bon état et permet un renouvellement de l’air et une évacuation de l’humidité normales ;
- les équipements de chauffage et de production d’eau chaude sont conformes aux normes de sécurité et en bon état ;
- la nature et l’état des matériaux de construction, des canalisations et des revêtements ne présentent pas de risques pour la santé et la sécurité des occupants ;
- le logement est protégé contre les infiltrations d’air parasites : les portes et fenêtres ainsi que les murs et parois donnant sur l’extérieur ou des locaux non chauffés présentent une étanchéité à l’air suffisante ;
- les menuiseries extérieures et la couverture avec ses raccords et accessoires assurent la protection contre les infiltrations d’eau.
Ainsi, par exemple, si un logement est mal ventilé, il peut devenir non-décent :
« Dans un logement sain, un certain volume d’air doit être renouvelé toutes les heures. Quand cette ventilation n’a pas lieu, des problèmes d’humidité apparaissent sur les murs, les mauvaises odeurs vont rester dans le logement, des bactéries vont se développer et entraîner avec elles des maladies respiratoires, l’humidité de l’air intérieur va augmenter avec des effets de condensation – la buée va rester plus longtemps sur les fenêtres -, on pourra trouver la présence de salpêtre sur le bas des murs, la mérule peut aussi se développer (la mérule est un champignon qui s’attaque au bois du logement et le détruit petit à petit – charpente, planchers, poutres en bois, meubles… ndlr) »
précise Karima Bensaou.
Pareillement, si un logement est mal isolé, et subit en conséquence des infiltrations d’air importantes, il n’est pas conforme aux critères fixés par le décret décence.
Ces nuisances et dégradations peuvent s’étendre aux parties communes ou toucher des parties privatives d’intérêt collectif. Là encore, pour garantir la sécurité et la santé de tous, il en va de la vigilance des copropriétaires qui doivent être attentifs aux signes de non-décence des logements individuels et de l’immeuble, et s’ils sont bailleurs, à l’écoute des retours de leurs locataires.
Quels travaux de rénovation énergétique faut-il faire pour pouvoir bien ventiler son logement ?
Ouvrir les fenêtres ne suffit pas à ventiler un logement car cela ne permet pas d’expulser l’air vicié.
Il est donc obligatoire de faire installer dans chaque logement un système de ventilation.
Le but : extraire l’air vicié des pièces salubres et renouveler l’air dans les pièces nobles (pièces de vie). Quelles sont les principales solutions de ventilation ?
Installation d’une VMC simple flux. Solution d’extraction de l’air des pièces salubres.
OU
Installation d’une VMC double flux. Solution de renouvellement de l’air dans toutes les pièces (extraction dans les pièces salubres et soufflage dans les pièces nobles).
Certaines exigences de décence (étanchéité à l’air…) traduisent la présence d’un critère de performance énergétique minimale. En effet, absent du décret d’origine, ce critère a été progressivement intégré à la notion de décence.
Le critère de performance énergétique minimale
L’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, modifié par la loi relative à la Transition Énergétique Pour la Croissance Verte du 17 août 2015 dispose que « le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent (…) répondant à un critère de performance énergétique minimale (…)« .
Le décret en Conseil d’État du 9 mars 2017 définit ce critère de performance énergétique minimale en précisant les qualités que le logement doit posséder (bonne ventilation, étanchéité à l’air…) pour pouvoir être qualifié d’énergétiquement décent au sens de la loi TEPCV. Ces éléments ont été ensuite intégrés au décret décence du 30 janvier 2002.
Cette étape introduit des exigences en matière de performance énergétique mais ne fixe aucun seuil précis de consommation d’énergie pour définir un logement décent. C’est en 2019 que la loi va plus loin et franchit le pas en créant un seuil maximal de consommation d’énergie finale.
Le seuil maximal de consommation d’énergie finale
La loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat instaure un seuil maximal de consommation d’énergie finale pour les logements décents.
En application de cette loi, le décret du 11 janvier 2021 modifie là encore le décret décence. Pour être qualifié de décent, le logement devra avoir une consommation d’énergie finale inférieure à 450 kWh/m2/an.
Bon à savoir
La consommation d’énergie finale d’un logement est estimée par un Diagnostic de Performance Énergétique (DPE).
Cette disposition entrera en vigueur le 1er janvier 2023 uniquement en France métropolitaine et ne s’appliquera qu’aux nouveaux contrats de location conclus à compter de cette date.
Depuis 2021, la même loi énergie et climat interdit au propriétaire bailleur d’un logement classé F ou G – c’est-à-dire dont la consommation est supérieure ou égale à 450 kWh/m2/an – et situé dans une zone tendue en matière de logement, d’en augmenter le loyer s’il ne l’a pas rénové.
La contrainte des 18°
Le Code de la construction et de l’habitation prévoit enfin (article R171-11) que les logements compris dans un bâtiment d’habitation doivent pouvoir être chauffés et pourvus d’eau chaude sanitaire « moyennant une dépense d’énergie limitée ».
Plus précisément, ces équipements de chauffage doivent permettre de « maintenir à 18° la température au centre des pièces du logement » et comprendre « des dispositifs de réglage automatique du chauffage » permettant de chauffer à une température inférieure à 18°.
Les copropriétaires ont l’obligation de faire des travaux de remplacement de système de chauffage si les équipements de l’immeuble ne sont pas conformes à ces critères techniques.
L’obligation de louer, vendre, occuper un habitat digne
La loi du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement définit l’habitat indigne comme suit : « (…) les locaux ou les installations utilisés aux fins d’habitation et impropres par nature à cet usage, ainsi que les logements dont l’état, ou celui du bâtiment dans lequel ils sont situés, expose les occupants à des risques manifestes, pouvant porter atteinte à leur sécurité physique ou à leur santé ».
La loi sur le droit au logement donne également une des premières définitions juridiques de la précarité énergétique, et crée une obligation pour les départements de mettre en place un observatoire des logements indignes.
Des agents municipaux sont à la disposition de l’exécutif local et du préfet pour lutter contre l’habitat indigne : c’est la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations. Maire, président d’intercommunalité (communauté de communes, communauté d’agglomération, métropole…) et préfet peuvent ordonner l’exécution de travaux, l’hébergement de personnes ou le relogement, aux propriétaires de logements indignes ou aux autres personnes responsables de situations d’habitat indigne.
Cette police est notamment chargée de faire respecter le Règlement Sanitaire Départemental (RSD) : un corpus de règles sanitaires fixées par chaque département concernant l’hygiène et la salubrité en matière de bâtiments, d’eaux usées, de gestion des déchets, etc.
L’obligation de Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) et l’incitation à entreprendre des travaux d’économies d’énergie
La loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite « loi climat et résilience ») étend l’obligation de réaliser un Diagnostic de Performance Énergétique à toutes les copropriétés (en France métropolitaine).
Elle modifie ainsi le Code de la construction et de l’habitation (article L 126-31 / L271-4 / L731-1) : « tout bâtiment d’habitation collective dont le permis de construire a été déposé avant le 1er janvier 2013 dispose d’un diagnostic de performance énergétique ». Cette nouvelle disposition entre en vigueur progressivement.
Type de copropriété | Date d’entrée en vigueur de l’obligation de DPE (France Métropolitaine) |
---|---|
Monopropriétés et copropriétés de plus de 200 lots | 01/01/2024 |
Copropriétés entre 50 et 200 lots | 01/01/2025 |
Copropriétés de moins de 50 lots | 01/01/2026 |
Cette obligation recouvre une incitation forte à entreprendre des travaux d’économies d’énergie.
L’obligation de rénovation énergétique pour accompagner des travaux de rénovation importants
Le décret du 30 mai 2016 relatif aux travaux d’isolation en cas de travaux de ravalement de façade, de réfection de toiture ou d’aménagement de locaux en vue de les rendre habitables (dit de « travaux embarqués ») rend obligatoire la réalisation de travaux d’isolation thermique en cas de rénovations importantes de bâtiments à usage d’habitation, de bureaux, de commerces, d’établissements d’enseignement et d’hôtels, et ceci que les maîtres d’ouvrage soient publics ou privés. Par la suite, le décret du 9 mai 2017 précise la nature des parois à isoler.
L’obligation de rénover les passoires thermiques
La loi climat et résilience (voir plus haut) fixe une interdiction progressive à la location des passoires thermiques c’est-à-dire des logements classés selon le Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) en étiquette G, F ou E. Elle le fait en modifiant le critère de performance énergétique d’un logement décent :
« Le niveau de performance d’un logement décent est compris, au sens de l’article L. 173-1-1 du code de la construction et de l’habitation :
1° A compter du 1er janvier 2025, entre la classe A et la classe F ;
2° A compter du 1er janvier 2028, entre la classe A et la classe E ;
3° A compter du 1er janvier 2034, entre la classe A et la classe D. »
Interdiction progressive de la location des passoires thermiques
Logements classés G | Logements classés F | Logements classés E |
---|---|---|
Interdiction à la location en 2025 | Interdiction à la location en 2028 | Interdiction à la location en 2034 |
Par ailleurs, elle interdit au propriétaire bailleur d’un logement classé F ou G, où qu’il soit situé, d’en augmenter le loyer s’il ne l’a pas rénové.
Logement en mauvais état : que faire ?
Vous êtes inquiété par l’état des parties communes de votre immeuble ? Votre logement individuel présente des signes de non-décence ? Voici la marche à suivre.
Vous êtes locataire en copropriété
Si vous êtes locataire et que votre immeuble ou logement individuel présente des signes de non-décence, assurez-vous de ne pas être responsable des dégradations. Certains travaux de faible ampleur sont à la charge des locataires et non des propriétaires. Vous pouvez évaluer la décence de votre logement avec l’aide de votre ADIL (Agence Départementale d’Information sur le Logement). Sinon, vous devez vous entendre avec votre propriétaire et les autres copropriétaires de l’immeuble sur un projet de travaux.
En cas d’absence d’accord avec les propriétaires, vous pouvez entreprendre des démarches pour les contraindre à réaliser des travaux en saisissant la Commission départementale de conciliation ou le juge du tribunal des contentieux de la protection.
Il est possible aussi de demander auprès de la mairie une visite de contrôle par un agent municipal. Si ce dernier constate que l’immeuble ou le logement individuel ne respecte pas le Règlement Sanitaire Départemental, le maire peut mettre en demeure les propriétaires pour qu’ils s’y conforment en faisant faire des travaux. Le locataire peut aussi se tourner vers l’Agence Régionale de Santé si le mauvais état de l’immeuble ou du logement individuel menace la santé de ses occupants.
Vous êtes copropriétaire
Si vous êtes copropriétaire (bailleur ou occupant), et que votre bien ou immeuble vous paraît en mauvais état, vous devez vérifier sa décence avec l’aide de votre ADIL (Agence Départementale d’Information sur le Logement) ou par tout autre moyen.
S’il est confirmé que votre immeuble ou logement individuel doit être rénové pour être conforme aux critères de décence et de dignité imposés par la loi, et/ou pour la bonne conservation de l’immeuble, vous devez élaborer avec les autres copropriétaires un projet de travaux.
Pour vous aider, vous pouvez faire appel à un Assistant à Maîtrise d’Ouvrage. Il vous prodiguera des conseils techniques et réalisera notamment le montage financier de votre projet, qu’il optimisera grâce à sa connaissance des aides financières travaux publiques et privées, et des prêts bancaires dédiés au financement de travaux.
En effet, de nombreux travaux de rénovation énergétique obligatoire copropriété peuvent être financés en partie avec les primes CEE et MaPrimeRénov’ Copropriété, ainsi que d’autres aides et solutions de prêts.