La loi ELAN de novembre 2018 et le décret tertiaire du 23 juillet 2019 obligent une partie des propriétaires de bâtiments tertiaires à réduire leurs consommations d’énergie. C’est le dispositif éco-énergie tertiaire. Le gouvernement a récemment apporté par voie de décret des précisions à cette obligation, en fixant pour certains bâtiments des seuils maximaux de consommation en énergie finale. Que contient donc le dispositif éco-énergie tertiaire ? En quoi est-il contraignant ?
Présentation du dispositif éco-énergie tertiaire
Le dispositif éco-énergie tertiaire est créé par la loi ELAN en novembre 2018.
Il n’entre vraiment en vigueur qu’en octobre 2019, après la publication du décret tertiaire un peu avant, au mois de juillet.
Il prévoit une obligation pour les propriétaires et les exploitants de bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m2 (soit plus de 83 % du parc tertiaire) :
- d’effectuer le reporting des consommations d’énergie de leur patrimoine ;
- de réduire la consommation d’énergie de leur patrimoine par tout moyen (travaux d’économies d’énergie, écogestes, changements d’habitudes et d’organisation…).
Quels sont les textes règlementaires du dispositif éco-énergie tertiaire ?
En 2010, une première tentative avortée est faite avec la loi Grenelle II pour fixer une obligation de réduction des consommations d’énergie des bâtiments tertiaires.
C’est la loi ELAN en novembre 2018 qui déterminera finalement des objectifs d’économies d’énergie dans les bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m2.
Les propriétaires peuvent choisir d’atteindre des objectifs relatifs ou absolus :
- des objectifs relatifs d’économies d’énergie de -40 % en 2030, -50 % en 2040 et -60 % en 2050par rapport à une année de référence située entre 2010 et 2020, choisie par les propriétaires du tertiaire ;
- des objectifs absolus, c’est-à-dire des valeurs de consommation d’énergie finale exprimée en kWh/m2/an fixées pour chaque catégorie de bâtiments.
Les propriétaires ont la possibilité de moduler ces objectifs, de les adapter à certaines contraintes ou à un éventuel changement d’activité ou de volume d’activité.
Les objectifs peuvent aussi être modifiés s’il existe une disproportion entre les coûts impliqués par une mise aux normes et les économies d’énergie à la clé.
BON à savoir
Si un propriétaire ou un exploitant se trouve dans une situation exceptionnelle nécessitant une adaptation des objectifs, il doit pour cela préparer un dossier technique.
Divers arrêtés ont précisé par la suite les modalités d’application du décret tertiaire.
Il faut savoir également que le décret BACS du 20 juillet 2020 impose une autre obligation aux bâtiments tertiaires équipés d’un système de chauffage ou de climatisation d’une puissance utile supérieure à 70 kW : celle d’installer une solution d’automatisation et de contrôle de la consommation d’énergie d’ici janvier 2025.
Qui est concerné par le décret éco-énergie tertiaire ?
L’obligation s’applique :
- aux propriétaires de bâtiments de plus de 1000m2 exclusivement alloués à un usage tertiaire ;
- aux propriétaires de parties d’un bâtiment à usage mixte (tertiaire et autres) dont le cumul des surfaces est égal ou supérieur à 1000m2;
- aux propriétaires d’un ensemble de bâtiments situés sur une même unité foncière ou un même site, à usage tertiaire uniquement ou mixte, dont la surface allouée à des activités tertiaires représente plus de 1000m2.
Activités tertiaires concernées par le dispositif éco-énergie tertiaire |
Services publics |
Santé |
Justice |
Enseignement |
Commerces |
Hôtellerie |
Restauration |
Tourisme et loisirs |
Sport |
Culture et spectacles |
Gares ferroviaires, routières, maritimes, fluviales, aérogares… |
Vente et services automobiles, moto ou nautiques |
Salles et centres d’exploitation informatique |
Stationnement |
Blanchisserie |
Imprimerie et reprographie |
Quel est le calendrier des premières obligations fixées par le décret tertiaire ?
30 septembre 2022 | Fin 2024 | 30 septembre 2026 | Fin 2031 |
1ère échéance de remontée des consommations | Analyse détaillée des données 2020-2023 | Échéance de déclaration de modulation des objectifs pour disproportion économique pour la 1ère décennie | Vérification de l’atteinte des objectifs de la 1ère décennie |
Quels sont les bâtiments publics concernés par le décret tertiaire ?
Tous les bâtiments publics à usage tertiaire, c’est-à-dire hébergeant des activités de service public, sont concernés par le décret tertiaire, comme les bâtiments d’enseignement maternelle, primaire, secondaire et supérieur, les établissements publics de santé ou encore les locaux administratifs des collectivités, les gares ferroviaires et routières…
Comment est mis en place le suivi des réductions de consommations ?
Le propriétaire, le bailleur ou l’occupant doit déclarer ses consommations d’énergie sur une plateforme en ligne, Operat, pour Observatoire de la performance énergétique de la rénovation et des actions du tertiaire.
La première échéance pour déclarer les consommations est fixée au 30 septembre 2022.
Quelles sont les sanctions encourues en cas de non-respect du décret tertiaire ?
Si les propriétaires ne respectent pas leurs obligations de réduction des consommations, ils se voient infliger une amende administrative par le préfet. Celle-ci va jusqu’à 1 500 € pour les personnes physiques et 7 500 € pour les personnes morales.
En cas de non-déclaration sur Operat, un dispositif de Name & Shame s’applique également après mise en demeure : les noms des propriétaires et occupants qui n’ont pas déclaré leurs consommations sont publiés sur un site internet.
Compte tenu de la faible sévérité des sanctions, on peut dire que le dispositif éco-énergie tertiaire est largement plus incitatif que contraignant.
Mais dans le contexte actuel de rehaussement des objectifs de réduction des émissions carbone au niveau européen, le dispositif sera sans doute amené à évoluer, et peut-être à se durcir.
La révision notamment de la directive européenne sur l’efficacité énergétique devrait impacter toutes les politiques publiques de rénovation énergétique des bâtiments en France.
Quelles actions mettre en œuvre pour se mettre en conformité avec le décret tertiaire ?
Dans un premier temps, les propriétaires doivent mettre en place par tout moyen la collecte de leurs données de consommation.
Parallèlement, pour réduire leurs consommations d’énergie, ils peuvent commencer par faire réaliser l’audit énergétique de chacun de leurs bâtiments.
L’audit contiendra un état des lieux de la consommation des bâtiments ainsi que des préconisations de travaux d’économies d’énergie chiffrés et budgétés.
Il faudra ensuite entreprendre des travaux de rénovation.
Bon à savoir
Le Contrat de Performance Énergétique (CPE) est une solution intéressante pour les propriétaires du tertiaire. Il s’agit d’un contrat passé entre un propriétaire et un professionnel de l’efficacité énergétique. Dans le contrat, le professionnel s’engage à faire réaliser à son client une économie d’énergie d’au moins 10 % grâce à des travaux d’isolation et/ou la pose d’un équipement (chauffage, ventilation). Si l’économie d’énergie n’est pas atteinte à l’issue des travaux, il s’acquitte d’une pénalité. Le CPE est financé par un Coup de Pouce CEE.
Économiser l’énergie dans un bâtiment tertiaire avec la pompe à chaleur air/air
Depuis décembre 2021, deux nouvelles opérations de travaux sont éligibles au financement par les CEE dans les bâtiments tertiaires :
- la pose de pompe à chaleur air/air réversible ;
- et le raccordement à un réseau de froid, pour climatisation.
Installer une pompe à chaleur air/air dans un bâtiment tertiaire est un bon moyen de réduire sa consommation d’énergie.
Le principe de fonctionnement de la pompe à chaleur air/air est d’absorber les calories d’un milieu, l’air extérieur, pour les restituer dans un autre, l’air du logement.
La PAC air/air, pour une unité d’électricité consommée, produit 2 à 5 unités de chaleur transmise au bâtiment. Elle offre ainsi un rendement de chauffage supérieur à 100%.